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Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 2.djvu/155

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dirons-nous rien des causes pour lesquelles des couronnes se distribuent au théâtre ou dans l’arène, et qu’il suffit de nommer pour les condamner, je veux dire des causes sacrées et funèbres ? En effet, que reste-t-il à faire sinon à couronner Jupiter Olympien, Hercule le Néméen, le chétif Archémore [1], et l’infortuné Antinous[2], dans la personne du Chrétien, pour servir lui-même de spectacle là où il ne lui est pas permis de regarder ?

Nous avons exposé, j’imagine, toutes les causes : pas une qui ait avec nous quelque chose de commun ; elles sont toutes étrangères, profanes, illicites, abjurées par nous le jour où nous avons prononcé notre serment. C’étaient bien là les pompes de Satan et de ses anges, les dignités du siècle, les honneurs, les solennités, les popularités, les vœux menteurs, les servitudes humaines, les vaines louanges, les gloires honteuses, et au fond de tout cela l’idolâtrie qui se résume dans les couronnes dont s’entoure chacune de ses vanités. Claudius commencera par me dire que le ciel, dans les vers d’Homère, se couronne d’astres. Assurément, c’est Dieu qui l’a couronné ; c’est en faveur de l’homme qu’il l’a couronné, donc, conclut-il, l’homme doit être couronné par Dieu. Mais le monde couronne les lieux de débauche, les latrines, les moulins, les prisons, les gymnases, les amphithéâtres, les vestiaires, et jusqu’aux cimetières eux-mêmes. Ne juge point de la sainteté et de l’honnêteté de cette coutume d’après un ciel unique que la poésie couronne, mais d’après le témoignage du monde tout entier. Toujours est-il que le Chrétien ne déshonorera jamais la porte de sa maison par des lauriers, s’il sait combien de faux dieux le démon a attachés à ses portes, Janus, qui vient de janua (porte) ; Limentinus, de limen (seuil) ; Forculus et

  1. Archémore était fils de Lycurgue, roi de Némée. Sa nourrice Hipsypile l’ayant déposé sur le gazon, pour montrer aux Grecs altérés une source voisine, il fut tué pendant ce temps-là par un serpent.
  2. Favori d’Adrien, divinisé après sa mort.