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Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 2.djvu/280

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TERTULLIEN.

respect pour le ciel et la terre, ne les appellerait pas volontiers du nom de père et de mère ? D’ailleurs, les étrangers qui surviennent tout à coup, n’avons-nous pas coutume de dire qu’ils sont tombés du ciel ? De là pour ce Saturne manifesté publiquement le privilége d’une origine céleste. Le vulgaire appelle aussi enfants de la terre ceux dont il ignore l’origine.

Je ne vous dirai pas qu’autrefois les hommes étaient si grossiers, que l’aspect d’un personnage inconnu les frappait ainsi que l’eût fait la présence de quelque divinité, et qu’aujourd’hui, tout instruits qu’ils sont, ils mettent au rang des dieux ceux dont la mort était, peu de jours auparavant, annoncée par un deuil public. Ce peu de mots sur Saturne suffira. Nous vous montrerons aussi que Jupiter était homme, issu d’un autre homme, et que tout cet essaim de dieux était mortel aussi bien que toute leur race.

XI. Comme vous n’avez point osé nier qu’ils fussent hommes, vous avez adopté pour système qu’ils ont été faits dieux après leur mort. Examinons pour quelles raisons. Il faut d’abord que vous admettiez l’existence d’un dieu supérieur, source unique de la divinité, qui de certains hommes ait fait des dieux ; car ceux-ci n’auraient, pu se donner une divinité qu’ils n’avaient pas, et celui-là l’accorder à ceux qui ne l’avaient point, à moins d’en être en possession lui-même comme d’une propriété. S’il n’existait personne pour les faire dieux, vainement vous supposeriez qu’ils aient pu le devenir, quand vous supprimez le principe de leur divinisation. Assurément, s’ils avaient pu par eux-mêmes se faire dieux, ils n’auraient jamais été hommes, puisqu’ils avaient la faculté d’une condition meilleure. Eh bien ! s’il est un être qui fasse des dieux, je reviens à l’examen des raisons de cette transformation d’hommes en dieux. Je n’en vois pas d’autre que celle-ci : Ce grand dieu, dans l’exercice de ses fonctions divines, avait besoin de secours et de service. Mais d’abord n’est-il pas indigne d’un Dieu d’avoir besoin du secours d’un