Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 2.djvu/388

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ainsi hors d’état de connaître les régions les plus élevées, le regardassent comme Dieu unique. Ces Vertus et ces anges inférieurs créèrent l’homme, qui n’ayant été créé que par des Vertus infirmes et sans puissance, rampa sur la terre comme un vermisseau. Mais l’Eon de qui était sorti Jaldabaoth, touché de compassion, envoya à l’homme, ainsi condamné à ramper, une étincelle qui, en réveillant ses facultés, le mit à même de raisonner et de connaître les régions supérieures. Que fit alors ce Jaldabaoth ? Dans son indignation, il tira de lui-même la Vertu et la ressemblance du serpent. Voilà quelle fut la Vertu dans le paradis, c’est-à-dire voilà quel fut le serpent, auquel Eve avait cru comme au Fils de Dieu. Elle cueillit par ses conseils, ajoutent-ils, le fruit de l’arbre : par là, il apporta au genre humain la science du bien et du mal. Ils ne croient pas que la chair de Jésus-Christ ait été réelle. Ils n’admettent pas davantage la résurrection de l’homme.

Il éclata encore une autre hérésie ; c’est celle des Caïniens. Ils exaltent Caïn, qu’ils regardent comme ayant été conçu par quelque Vertu puissante qui opéra en lui. Car Abel, selon eux, né d’une Vertu inférieure, avait été procréé ; voilà pourquoi il était inférieur. Ceux qui parlent ainsi, revendiquent aussi le traître Judas, qu’ils proclament grand et admirable, à cause du service qu’il rendit au genre humain. Quelques-uns, en effet, croient devoir remercier solennellement Judas de sa trahison. Comme il remarquait, disent-ils, que Jésus-Christ essayait de détruire la vérité, il le livra pour que la vérité ne fût pas détruite. D’autres, au contraire, raisonnent dans ce sens. Les puissances de ce monde ne voulaient pas que Jésus-Christ endurât sa passion, de peur que le genre humain ne recouvrât le salut par sa mort. Judas, pour consommer le salut du genre humain, livra le Christ, afin que le salut, qui était entravé par les Vertus dont la haine s’opposait à l’avènement du Christ, ne fût plus entravé, ni la