Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 2.djvu/40

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intelligence pour embrasser l’intégrité des choses, faisant divorce principalement avec les yeux, les oreilles, et pour le dire en un mot, avec le corps tout entier, parce qu’il trouble l’âme et ne lui permet pas de posséder la vérité ni la sagesse, quand il est en communication avec elle. Nous voyons donc qu’à côté du sentiment s’élève une autre faculté beaucoup plus puissante, je veux dire ces forces de l’âme qui opèrent l’intelligence de la vérité, dont les œuvres ne sont ni palpables, ni exposées aux sens corporels, mais se tiennent à une grande distance de la conscience humaine, placées dans un lieu secret, au plus haut des cieux, dans Dieu lui-même. Platon, en effet, veut qu’il existe certaines substances invisibles, incorporelles, célestes, divines et éternelles, qu’il appelle idées, c’est-à-dire formes, exemplaires, et causes de tout ce qui se manifeste à nos yeux et frappe nos sens. Les idées sont les vérités : les phénomènes naturels en sont les images. Eh bien ! les germes de l’hérésie des Gnostiques et. des Valentiniens sont-ils reconnaissables ? C’est là qu’ils ont pris leur distinction entre les sens corporels et les forces intellectuelles, distinction à laquelle ils ajustent la parabole des dix vierges. Les cinq vierges folles, disent-ils, figurent les sens corporels, insensés parce qu’ils sont faciles à tromper : les vierges sages sont une représentation des forces intellectuelles, sages, parce qu’elles découvrent cette vérité mystérieuse, supérieure à notre monde, et placée dans le Plérôme, sacrement des idées hérétiques. Car tels sont leurs Eons et leurs généalogies. Ils divisent donc le sentiment en deux. Ils font descendre l’intellect de leur semence spirituelle ; quant au sentiment corporel, il proviendra de l’animal, parce qu’il est incapable de concevoir les choses spirituelles : au premier par conséquent le domaine invisible ; au second les choses visibles, humbles, temporaires, et qui sont embrassées par les sens, parce qu’elles résident dans les images. Voilà pourquoi nous avons commencé par établir que l’esprit n’est pas autre chose