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Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 2.djvu/400

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TERTULLIEN.


cesse de l’être. L’homme lui-même, auteur de toutes sortes de crimes, n’est pas seulement l’œuvre de Dieu ; il est encore son image. Et cependant il s’est révolté contre son Créateur, et dans son corps et dans son intelligence. En effet, nous n’avons pas reçu des yeux, pour les feux de la concupiscence, des oreilles pour les ouvrir aux mauvais discours, une langue pour la prostituer à la calomnie, une bouche pour les sollicitations de la gourmandise, la virilité pour la tourner aux excès de l’incontinence, des mains pour les consacrer au vol, des pieds pour courir au crime : notre âme n’a point été unie au corps pour devenir un arsenal de fraudes, de mensonge et d’iniquité. Je ne l’imagine pas. Ainsi donc, s’il est vrai que Dieu, principe de sainteté, haïsse le mal et jusqu’à la pensée du mal, il suit évidemment qu’il n’a point créé pour des fins criminelles ce qu’il condamne, puisque les instruments de nos fautes ne deviennent mauvais que par le mauvais usage que nous en faisons. Nous donc qui, en connaissant Dieu, connaissons également son rival ; nous qui avons appris à distinguer le Créateur d’avec le faussaire, pourquoi nous étonner et douter encore, puisque l’adresse de l’ange faussaire et jaloux, après avoir réussi dès l’origine à faire déchoir de son innocence l’homme image du Dieu qui l’a créé et maître de l’univers, pervertit et tourna contre le Créateur toutes les facultés que l’homme avait reçues du Créateur pour une destination d’innocence et d’intégrité ? Il avait vu avec douleur que l’empire sur l’universalité des êtres fût échu à l’homme plutôt qu’à lui-même. Que fit-il ? Il souleva contre le Créateur le roi de la création, afin d’établir dans la création son propre domaine.

III. Cette doctrine ainsi exposée contre l’opinion des païens, occupons-nous plutôt d’instruire les nôtres. En effet, la foi de quelques-uns, soit simplicité, soit scrupule, réclame l’autorité des Écritures pour renoncer aux spectacles, hésitant ainsi à s’abstenir de plaisirs que des textes