Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 2.djvu/51

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et supérieure aux principautés qui gouvernent le monde. Suivant Apelles, les âmes ont été attirées des régions supérieures au ciel, au moyen des séductions de la terre, par l’ange igné, le Dieu d’Israël et le nôtre, qui leur ajusta ensuite une chair pécheresse. L’école de Valentin introduit dans l’âme une semence de Sophie, ou la Sagesse, par laquelle ils retrouvent dans les images des choses visibles les rêves et les fables milésiennes de leurs Eons. Je regrette sincèrement que Platon ait fourni l’aliment de toutes les hérésies. N’est-ce pas lui qui a dit dans le Phédon, que les âmes voyagent tantôt ici, tantôt là ? Dans le Timée, il veut que les enfants de Dieu auxquels avait été confié le soin de créer les mortels, aient pris un germe d’immortalité et moulé autour de cette âme un corps mortel. Il déclare ensuite que ce monde est l’image d’un autre monde. Pour accréditer l’opinion que l’âme avait autrefois vécu avec Dieu au ciel, dans le commerce des idées, qu’elle est partie de là pour descendre sur la terre, et qu’elle ne fait que s’y rappeler les exemplaires qu’elle a connus anciennement, il inventa ce principe nouveau : Apprendre, c’est se souvenir. En effet, les âmes, ajoute-t-il, en venant sur la terre, oublient les choses au milieu desquelles elles ont été, mais les choses visibles les retracent dans leur mémoire. Ce système de Platon renfermant des insinuations qu’empruntent les hérétiques, ce sera réfuter suffisamment l’hérésie, que de renverser le principe de Platon.

XXIV. D’abord je ne lui accorderai pas que l’âme soit capable d’oubli, parce qu’il l’a gratifiée de qualités si divines qu’il la fait égale à Dieu. Il l’a déclare innée : j’aurais pu m’armer de ce témoignage seul pour attester qu’elle possède pleinement la divinité. Il ajoute qu’elle est immortelle, incorruptible, incorporelle, parce qu’il a cru la même chose de Dieu, invisible, impossible à représenter, identique, souveraine, raisonnable, intelligente. Quelle autre qualité assignerait-il à l’âme, s’il la nommait un Dieu ?