Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 2.djvu/55

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

un empêchement à la seconde ? En dernier lieu, qui se souviendrait plus que les jeunes enfants, âmes toutes récentes, qui ne sont pas encore plongées dans les soins domestiques ou publics, adonnées uniquement à des études dont la connaissance n’est qu’une réminiscence ? Il y a mieux. Pourquoi ne nous souvenons-nous pas tous également, puisque nous oublions tous également ? Mais non, il n’y a que les philosophes qui se souviennent, encore ne sont-ce pas tous les philosophes. Platon seul, au milieu de cette multitude de nations, au milieu de cette foule de sages, a oublié et s’est rappelé les idées. Conséquemment, si l’argumentation principale ne se soutient aucunement, avec elle tombe aussi l’assertion à laquelle on l’a associée, à savoir que les âmes sont innées, qu’elles ont vécu dans les demeures célestes, qu’elles y ont été instruites des mystères divins, qu’elles en sont descendues, et qu’ici-bas elles ne font que se souvenir, sans doute pour fournir une autorité aux hérétiques.

XXV. Je reviens maintenant à la cause de cette disgression, afin d’expliquer comment les âmes dérivent d’une seule, quand, où et comment elles ont été formées. Il est indifférent ici que la question soit adressée par un philosophe, par un hérétique ou par le vulgaire. A ceux qui font profession de la vérité, qu’importent ses adversaires, même les plus audacieux, tels que ceux qui soutiennent d’abord que l’âme n’est point conçue dans l’utérus en même temps que se forme la chair, mais que l’accouchement une fois opéré, elle est introduite extérieurement dans l’enfant, qui ne vit pas encore ? Ils ajoutent que la semence de l’homme déposée dans le sein de la femme, et mise en mouvement par une impulsion naturelle, se convertit en la substance solide de la chair. Cette dernière, en venant à la lumière, toute fumante encore de la chaleur du corps, et liquéfiée par elle, est frappée par le froid de l’air comme le fer embrasé que l’on trempe dans l’eau froide, reçoit à l’instant même la force animée et rend des sons articulés. Cette opinion est partagée par les Stoïciens, par Œnésidème, et quelquefois même par Platon, quand il