Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 3.djvu/162

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
152
TERTULLIEN.

teur, les pièges du monde et les séductions de toute nature, la Foi, en sortant du bain régénérateur, courrait encore de grands périls. Que d’infortunés périraient après avoir recouvré le salut ! Que de convives profaneraient la robe du banquet nuptial ! Que de négligents oublieraient de renouveler l’huile de leur lampe ! Enfin que de brebis à poursuivre à travers les vallées, à travers les montagnes, et à rapporter sur ses épaules ! Il place auprès de nous, comme seconde espérance et ressource dernière, les luttes du martyre, bain sanglant auquel la sécurité est acquise désormais, et dont le psalmiste chantait ainsi la suprême félicité : « Heureux celui à qui son iniquité a été pardonnée et dont le péché a été couvert ! Heureux l’homme auquel Dieu n’a point imputé son crime ! » En effet, que reste-t-il à imputer aux martyrs qui ont déposé leur vie elle-même dans ce bain réparateur ? Ainsi, « couvrant la multitude des péchés, parce qu’elle aime Dieu de toutes ses forces, » (elle les emploie dans les luttes du martyre) « de toute son ame, » (elle la livre volontairement pour Dieu) la charité constitue le martyr. Remèdes, conseils, jugements, spectacles, tout cela vous paraît-il encore une cruauté de mon Créateur ? Dieu a-t-il soif du sang de l’homme ? Oui, répondrai-je avec confiance, si l’homme a soif du règne de Dieu, si l’homme a soif d’un salut qui ne coure plus aucune chance, si l’homme a soif d’une seconde régénération. On ne peut envier à qui que ce soit une indemnité où la mesure de la récompense et du châtiment est la même pour tous ?

VII. Que le scorpion de l’hérésie vienne encore darder son aiguillon et crier que Dieu est homicide, je repousserai avec horreur le souffle empoisonné du blasphème qu’exhale la bouche du sectaire, mais je n’embrasserai pas moins sur le témoignage de la raison un Dieu, ainsi fait, par la raison même que, sous le nom de la Sagesse et par la bouche de Salomon, il se déclare lui-même plus qu’homicide. « La Sagesse, dit-il, a égorgé ses enfants, » Immolation