Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 3.djvu/216

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lui a remis en main toutes choses dès le commencement. Depuis que « le Verbe était en Dieu et que le Verbe était Dieu, toute puissance lui a été donnée au ciel et sur la terre. Le Père ne juge personne, mais il a remis tout jugement au Fils, » dès le commencement toutefois. En disant que toute puissance et tout jugement lui ont été donnés, que tout a été fait par lui, et que tout lui a été remis en main, il n’excepte aucune époque, parce que le mot tout serait une imposture, s’il y avait quelque temps d’excepté. Conséquemment, c’est le Fils qui a jugé dès le commencement, en brisant la tour de l’orgueil, en dispersant les langues, en châtiant l’univers par le débordement des eaux, « en faisant pleuvoir sur Sodome et Gomorrhe le soufre et le feu, Seigneur du Seigneur. » C’est encore lui qui descendit souvent jusqu’à converser avec l’homme ; lui qui, depuis Adam jusqu’aux patriarches et aux prophètes, préludant dès le commencement en vision, en songe, en image, en énigme, à l’œuvre qu’il devait poursuivre jusqu’à la fin, apprenait ainsi tous les jours. Et « quel autre Dieu a pu converser ici-bas avec les hommes, » que le Verbe qui devait s’incarner ? Mais pourquoi apprendre ainsi tous les jours ? Pour nous aplanir les routes de la foi ; pour nous incliner, plus facilement à croire que le Fils de Dieu était descendu dans le monde, quand nous saurions que le passé avait déjà vu quelque chose de semblable ; « car tout ce qui a été écrit, de même que tout ce qui a été fait, a été écrit et fait pour nous instruire, nous qui sommes à la fin des temps. » Voilà pourquoi aussi il connaît déjà dès ce moment les affections humaines, puisqu’il devait emprunter à l’homme sa double substance, sa chair et son ame. Regardez-le ! « Il interroge Adam, » comme s’il ne savait pas où il est ; « il se repent d’avoir créé l’homme, » comme si sa prescience ne l’avait pas averti d’avance ; il éprouve Abraham, comme s’il ignorait ce qui se passe dans l’ homme ; a-t-il été offensé, il se réconcilie ; et enfin les mille circonstances que les hérétiques reprochent