Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 3.djvu/451

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

les lois Juliennes[1] sont encore en vigueur sous l’empire du Christ, et que les vierges ou les hommes sans enfants ne sont aptes à rien recueillir de son testament, à la bonne heure. Mariez-vous donc éternellement, afin que le dernier jour vous surprenne dans ce continuel mélange de la chair, comme autrefois Sodome et Gomorrhe,ou les contemporains du déluge. A ces deux mots, « mangeons et buvons, » ajoutez-en un troisième, « marions-nous ; car nous mourrons demain ; » sans vous rappeler que cet anathème : « Malheur aux femmes enceintes ou nourrices, » sera bien plus amer et plus terrible, dans la destruction du monde tout entier, qu’il ne l’a été dans la dévastation de la Judée, qui n’est qu’une si faible partie du monde. Rassemblez donc par la réitération des mariages des fruits aussi bien appropriés aux derniers temps, que des mamelles gonflées de lait, et des flancs chargés de dégoût ou poussant des cris. Préparez à l’antechrist, je le veux bien, une plus riche matière à ses cruautés. Il vous amènera pour accoucheuses des bourreaux.

XVII. « La faiblesse de la chair, » répétez-vous ! En vérité, vous aurez là une merveilleuse prérogative à présenter au tribunal du Seigneur ! Mais alors elle n’aura plus pour juge un Isaac, notre père, qui ne connut qu’un seul mariage, un Jean, dont la virginité faisait les délices de Jésus-Christ ; une Judith, fille de Mérare, ni tant d’autres illustres saints. Il ne faudra que des juges païens. Une reine de Carthage se lèvera pour prononcer contre des Chrétiennes, elle qui, fugitive sur un sol étranger, au moment où elle aurait dû aspirer d’elle-même aux noces d’un roi, refuse d’en célébrer de secondes, et, par un exemple contraire, aime mieux brûler que de se marier. Auprès d’elle siégera cette dame romaine qui, outragée dans un attentat nocturne, mais n’en ayant pas moins subi les violences d’un étranger, lava dans son sang la souillure de sa chair, afin

  1. Elles ordonnaient la paternité sous les peines les plus sévères.