Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 3.djvu/477

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

réhabiliter le fils qui a dissipé tous ses biens, puisque d’une part il publiera avec allégresse qu’il a retrouvé la dragme perdue, l’eût-il retrouvée dans un fumier immonde ; et que de l’autre il rapportera au bercail, sur les épaules du Seigneur lui-même, la brebis fugitive, quand même elle se serait égarée à travers les montagnes et les précipices. Toutefois nous aimons mieux être moins ingénieux peut-être dans les Ecritures que d’être ingénieux contre elles. Nous devons donc respecter le sens du Seigneur ainsi que ses préceptes. On peut pécher aussi grièvement en interprétation qu’en action.

X. Après s’être affranchis de la nécessité d’appliquer au païen le sens de ces paraboles, après avoir entrevu ou admis celle de ne pas les interpréter autrement que le comporte le but que l’on s’y proposait, nos adversaires soutiennent maintenant que l’injonction de faire pénitence ne convient pas aux païens, dont les prévarications ne sont pas assujetties à la pénitence, parce qu’il faut les imputer à l’ignorance qui n’est coupable envers Dieu que du côté de la nature. Par conséquent, ajoutent-ils, il n’y a pas connaissance du remède là où il n’y a pas connaissance du péril ; la pénitence n’est raisonnable qu’autant que la prévarication a été le fruit de la conscience et de la volonté, accompagnées du sentiment de la faute et de la grâce. Quel est celui qui pleure ? quel est celui qui s’humilie ? L’homme qui sait ce qu’il a perdu, et ce qu’il recouvrera, s’il immole la victime de la pénitence en l’honneur de ce même Dieu qui, à ce titre, la prescrit à ses enfants bien plus qu’à des étrangers. — Quoi donc, leur répondrai-je, parce que les Ninivites étaient païens, Jonas pensait-il qu’ils fussent dispensés de la pénitence, lorsqu’il déclinait l’office de la prédication ? Ou plutôt, prévoyant que la miséricorde de Dieu se répandait jusque sur les étrangers, la redoutait-il comme l’anéantissement de la prédication ! Toujours est-il que le prophète faillit périr à cause d’une cité profane qui jusque-là ne connaissant pas Dieu, péchait encore par ignorance,