Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 3.djvu/479

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de l’ame, quelque surprise du regard te détourne de ta course, qu’importe ? Dieu est bon ; c’est aux siens et non aux païens qu’il ouvre ses bras ; une seconde pénitence va t’accueillir ; d’adultère que tu étais, tu seras de nouveau chrétien.

Voilà ce que tu me dis, ô compatissant interprète de Dieu. Je me rendrais volontiers, si l’Ecriture du Pasteur[1] avait mérité de prendre place parmi les livres canoniques, ou plutôt si le concile de toutes les Églises, même des vôtres, ne l’avait rangée parmi les livres faux ou apocryphes, adultère elle-même et par cette raison défenseur de ses pareils. Va, elle est bien digne de t’initier, puisqu’elle n’a tout au plus pour elle que ce pasteur[2], que tu figures sur le calice, profanateur lui-même du sacrement chrétien, véritable idole de l’ivresse, asile de la fornication qui suit l’ivresse, et dont tu ne bois rien plus volontiers que la brebis de la seconde pénitence. Quant à moi, je vais puiser aux Ecritures de ce Pasteur, dont l’incorruptibilité ne sait pas fléchir. C’est lui que dès l’abord Jean-Baptiste me montre, lorsqu’avec le bain baptismal et l’obligation de la pénitence, il m’adresse ces mots : « Faites de dignes fruits de pénitence, et gardez-vous de dire en vous-mêmes : Nous avons Abraham pour père (de peur, sans doute, qu’ils ne s’autorisassent de l’adoption paternelle pour pécher de nouveau.) Car je vous dis que de ces pierres mêmes Dieu peut susciter des enfants à Abraham. » Voilà comme il nous conseille de renoncer au péché en faisant de dignes fruits de pénitence. Je le demande, à quel autre signe qu’à la réforme absolue des mœurs, se reconnaît le fruit de la pénitence ? Si on le fait

  1. Attribuée à Hermas.
  2. Il semble à Tertullien, dans l’exagération de ses doctrines et de son style si figuré, que l’image du bon Pasteur, peinte sur le calice, était une sorte d’invitation à l’adultère, parce qu’il promettait le pardon au repentir, etc.