Page:Tertullien - De paenitentia. De pudicitia, 1906.djvu/164

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païens pécheurs, et de ce fait qu’il partageait leurs repas. [3] Là-dessus le Seigneur donna l’image de la brebis perdue et retrouvée. Dès lors, à qui voulez-vous que le Seigneur ait appliqué ce retour au troupeau de la brebis perdue, sinon au païen perdu dont il s’agissait, et non au chrétien qui n’existait pas encore ? Ou comment admettre que le Seigneur, en une réponse qui eût été une mystification, ait oublié l’aspect présent de la critique qu’il devait rétorquer, pour se mettre en peine d’un aspect à venir ?

[4] Mais la brebis, dit-on, c’est proprement le chrétien ; le troupeau du maître, c’est le peuple de l’Église, et le bon pasteur, c’est le Christ. C’est pourquoi il faut entendre par la brebis le chrétien qui s’est égaré loin du troupeau de l’Église.

[5] Tu veux donc que le Seigneur ait répondu, non pas aux murmures des Pharisiens, mais à ton idée préconçue ? Cependant il te faudra revendiquer cette parabole de telle manière que tu nies que les traits qui, selon toi, conviennent au chrétien puissent s’appliquer au païen. [6] Or réponds-moi : est-ce que le genre humain tout entier n’est pas le troupeau de Dieu ? Toutes les nations n’ont-elles pas le même Dieu, le même maître, le même pasteur ? Qui est perdu pour Dieu plus que le païen, tant qu’il persévère dans l’erreur ? Qui Dieu cherche-t-il plus que le païen, quand le Christ l’appelle à lui ? [7] Enfin cet ordre a priorité chez les païens : car on ne devient pas chrétien, de païen qu’on était, sans avoir été d’abord perdu, puis cherché par Dieu et rapporté par le Christ. Il faut donc conserver cet ordre pour interpréter la figure par rapport à ceux à qui elle s’applique en premier lieu.