Page:Tertullien - De praescriptione haereticorum, trad de Labriolle, 1907.djvu/37

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guerre tenue en réserve, dont il ferait usage s’il le voulait, mais qu’il préfère laisser en arrière du champ de bataille parce qu’il a d’autres moyens de vaincre l’ennemi. S’il évite d’alléguer le compendium praescriptionis, la méthode abrégée de prescription, c’est qu’il ne veut pas laisser croire à ses adversaires qu’il se défie de la bonté de sa cause[1]. Il se donne donc les airs de condescendre à des discussions auxquelles il aurait strictement le droit de se dérober. Mais enfin il les accepte ! et cette attitude nous induit à croire qu’il sentait bien les insuffisances de sa théorie.

En réalité, on aperçoit sans trop de peine la préoccupation qui la lui a dictée. C’est une préoccupation d’homme d’Église qui se sent charge d’âmes, et qui a mesuré la faiblesse des âmes dont il est responsable. « Nam et multi rudes, et plerique sua fide dubii, et simplices plures quos instrui, dirigi, muniri oportebit[2]. » Des esprits d’une culture raffinée, et dont la subtilité séduisante

  1. Voir les textes 2o, 5o, 6o, 12o, 13o, 14o, 15o : j’appelle surtout l’attention sur les textes 2o et 14o. Il est à noter que dès le De Praescriptione il laissait percer la même inquiétude (XVI1).
  2. Resurr. carnis II (Kroymann, p. 28, l. 3 ; cf. Adv. Gnosticos Scorpiace I (Reifferscheid, p. 145, l. 10) : « Nam quod sciaut multos simplices ac rudes, tum infirmos, plerosque vero in ventum, et si placuerit Christianos. »