Page:Textes choisis (Leonardo da Vinci, transl. Péladan, 1907).djvu/179

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nière claquante au vent, entraîne une folle multitude qui atteste sans cesse avec clameur les infinis effets d’un tel art ; et les livres remplis de ces choses affirment que les esprits incarnés apparaissent et parlent, sans langue, sans instrument organique nécessaire au langage ; et non seulement parlent, mais soulèvent des poids très lourds, font tempêter et pleuvoir ; et que les hommes se changent en chats, loups et autres bêtes, bien que parmi elles le plus bête est celui qui affirme de telles choses !

Et certainement si la nigromantie était telle que les bas esprits la croient, aucune chose sur la terre ne l’égalerait, pour le service de l’homme et pour sa perdition. S’il était vrai que cet art donne la puissance de troubler la tranquille sérénité de l’air et la changer en aspect nocturne, de déchaîner les vents avec d’effrayants tonnerres et des éclairs déchirant les ténèbres, et avec des ouragans de renverser les édifices, de déraciner les forêts et d’exterminer les armées et les dispersant et couchant à terre ; en outre de fomenter les terribles tempêtes privant les cultivateurs du prix de leurs fatigues : quelle guerre pourrait égaler un tel dommage, pour attaquer son ennemi, que d’avoir la puissance de le priver de ses récoltes ? Quelle bataille maritime pourrait être assimilée à celle où l’on commande aux vents et qui fait la fortune ruineuse et submergeante