Page:Theodore Pavie - Histoire des trois royaumes vol 2, Duprat, 1851.djvu/119

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

l’autorité que Tsao s’était arrogée dans le maniement de toutes les affaires, et comme ce ministre tout-puissant ne faisait aucun cas de sa personne sacrée. Maintenant qu’il avait retrouvé cet oncle, héros qui comptait dans l’Empire, il lui semblait que le ciel auguste lui montrait la route à suivre ! Aussitôt il voulut que Hiuen-Té eut ses entrées libres dans le palais impérial, lui témoigna les égards dus au frère de son propre père, et le traita dans un splendide festin. Il désira même que Tsao accordât un titre plus élevé a son parent ; le premier ministre nomma Hiuen-Té général en chef du second corps d’armée et prince de Y-Tching-Ting. Hiuen-Té s’était agenouillé pour témoigner sa reconnaissance ; les cérémonieuses politesses une fois achevées, il se retira.

Dès lors, tout le monde l’appelait oncle de l’Empereur. Quand Tsao fut rentré dans son palais, le conseiller Sun-Yo et tous ses collègues vinrent le trouver et lui dirent : « Le fils du Ciel a reconnu le lien de parenté qui l’unit à Hiuen-Té ; nous craignons que cette déclaration ne soit de mauvais augure pour voire excellence ! — Oh ! répondit le ministre, Hiuen-Té et moi, nous sommes unis comme deux frères ; songerait-il à devenir mon rival ? — Il est un des premiers hommes de l’époque, ajouta Liéou-Yé, et qui sait jusqu’où il peut arriver[1] ? — Eh bien, dit Tsao, avec les bons comme avec les méchants, on n’a que trente ans (la durée d’une vie humaine) à échanger des marques de politesse. Quelle que soit sa façon d’agir envers moi, je sais comment je dois me conduire[2] ! » On le vit en effet paraître en public assis sur un même char avec Hiuen-Té ; il partageait sa chambre avec lui, lui donnait une part des meilleurs mets, et le comblait d’attentions comme s’il eût été son jeune frère.

Un jour le mandarin Tching-Yo vint le voir et lui dit aussi : « Vous voici débarrassé de Liu-Pou ; tout l’Empire tremble devant vous ; le moment n’est-il pas venu de vous déclarer le chef

  1. Littéralement : il n’est pas une chose dans un étang ; expression figurée dont le sens est expliqué par Morrison, à l’article che, (Bas. 4,858, Tchy).
  2. L’édition in-18 ne rapporte pas ce dialogue, dans lequel Tsao se montre fort tranquille parce qu’il a déjà pris ses mesures ; elle le remplace par une conversation qui met Tsao à même de développer ses plans.