Page:Theodore Pavie - Histoire des trois royaumes vol 2, Duprat, 1851.djvu/326

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Tchang-Ho avoua qu’il avait la même pensée ; tous les deux, avec leur monde, ils se mirent en devoir d’exécuter ce dessein. Hia-Héou-Tun en annonçant à Tsao leur soumission, l’engageait à les accueillir avec quelque défiance  : « Ah ! répondit l’heureux ministre, j’aurai le talent de les convertir ! S’ils ont le cœur mauvais, je les changerai et j’en ferai des gens de bien. »

Aussitôt il ouvrit les portes et reçut les deux transfuges qui, déposant les armes, se prosternèrent le visage contre terre : « Si votre maître vous eût écoutés, leur dit-il, il n’aurait pas essuyé cette défaite. Jadis Tsé-Sou de Ou périt par sa faute, pour avoir manqué de prévoyance. Aujourd’hui que vous venez tous les deux vous soumettre à moi, je retrouve en vous Oey-Tsé quittant le royaume de Yn, et Han-Sin embrassant la cause du prince de Han[1]. » Il leur donna à l’un et à l’autre le rang de général (sans commandement de district), et le titre de prince.

Le surnom honorifique de Tchang-Ho était Tsun-Y ; il descendait d’une famille originaire de Hou-Kien-Fou ; Kao-Lan venait de Long-Sy. Tsao les traita avec beaucoup d’égards ; les troupes de Youen-Chao, privées de ces deux officiers, affligées de la perte des vivres entassés à Ou-Tchao, perdirent tout courage, et ne songèrent plus qu’à se cacher. Ce fut alors que le transfuge Hu-Yéou pressa Tsao-Tsao d’attaquer vivement son ennemi.

Cette même nuit, les trois corps d’armée se mirent en marche pour assaillir le camp de Youen-Chao ; le transfuge Kao-Lan avait obtenu de Tsao, d’après les conseils de Hu-Yéou, le commandement de l’avant-garde. Le combat fut acharné et se prolongea jusqu’au jour ; les soldats se rendirent par milliers ; quant

  1. Oey-Tsé était fils naturel de Ty-Y, Empereur de la dynastie des Yn (1168 avant notre ère). Voyant les crimes de Chéou-Sin, il se rendit en suppliant vers Wou-Wang, roi de Tchéou, qui fonda la dynastie de ce nom, l’an 1122 avant notre ère. (Voir sur Han-Sin, vol. Ier, les notes des pages 145 et 196). Tsé-Sou est probablement le prince de Ou qui, pour venger son fils tué par l’héritier présomptif dans une querelle, se révolta contre les Han et périt avec ses partisans, l’an 154 avant notre ère, dans une attaque imprudente sur le camp impérial. L’Histoire générale de la Chine (tome II, pages 580 et suivantes), raconte ces événements sans désigner le prince de Ou par son nom.