Page:Theodore Pavie - Histoire des trois royaumes vol 2, Duprat, 1851.djvu/420

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valiers dispersés en tous sens, promènent leurs regards sur l’horizon ; c’est en vain, ils ne découvrent point Hiuen-Té.

Déjà Tsay-Mao était rentré dans la ville ; Tsé-Long revient en arrière, saisit les gardes de la porte et les interroge à leur tour. Ils lui répondent aussi que Hiuen-Té a passé au galop sous la porte de l’ouest. Sa première pensée fut alors de pénétrer dans les murs ; mais la crainte de tomber dans une embuscade (qui l’attendait en effet) le décide à se diriger vers Sin-Yé.

Or, après avoir traversé cette dangereuse rivière, Hiuen-Té, tout étourdi, presque sans connaissance, fit route du côté de Nan-Tchang : « Si je suis sorti d’un bond du milieu de ces flots écumeux, se disait-il, en vérité, c’est le ciel qu’il l’a voulu ! » Il marchait donc droit devant lui ; comme le soleil allait se coucher, il aperçut un jeune berger qui venait à sa rencontre, monté sur un bœuf, en jouant de la flûte. « Hélas, pensa le héros en soupirant, que ne suis-je comme lui !... » Puis, arrêtant son cheval, il regarde le petit paysan qui de son côté fait faire halte à son bœuf, ôte la flûte de ses lèvres et s’écrie après l’avoir considéré longtemps : « A n’en pas douter, général, vous êtes Liéou-Hiuen-Té, le vainqueur des Bonnets-Jaunes ! »

« Vous n’êtes qu’un jeune enfant de village, demanda le héros tout surpris, comment donc connaissez-vous mes noms ? — En effet, je ne vous connais pas, répondit le petit pâtre ; mais chez le maître que je sers, il y a toujours des étrangers qui parlent d’un Liéou-Hiuen-Té, haut de sept pieds cinq pouces, dont les grandes mains descendent plus bas que le genou, dont les grands yeux s’ouvrent jusqu’aux oreilles ; ils disent que c’est le héros du siècle : et voila qu’en regardant le visage de votre seigneurie, j’ai été sûr que c’était vous.... »

« Et comment se nomme ton maître ? »

« Son nom est Ssé-Ma-Hoey, son surnom honorifique Té-Tsao ; il s’appelle, dans la secte des Tao-Ssé, le docteur Chouy-King[1]. »

  1. Il était de Yng-Tchouen. « Chouy veut dire eau ; King, miroir. L’eau étant unie avec le ciel peut alimenter tous les êtres. Elle peut prendre la