Page:Theodore Pavie - Histoire des trois royaumes vol 2, Duprat, 1851.djvu/50

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patronage et dirigent par leur influence le peuple de l’Empire ; je veux donc répondre aux ordres du ciel qui m’appelle, me déclarer Empereur. Vous tous, vassaux ici présents, servez-moi avec la fidélité et le dévouement qu’on doit au souverain. »

« Seigneur, répondit le premier secrétaire, Yen-Hiang, gardez-vous d’agir ainsi. Jadis, les vertus surnaturelles de Héou-Tsy, aïeul[1] du fondateur de la dynastie des Han, s’étaient transmises à Wen-Wang qui, par ses mérites et ses talents, se fit un si grand nom. Cependant, il avait pour lui les deux tiers de l’Empire, qu’il obéissait encore au légitime souverain Chéou-Sin. Bien que votre famille depuis quatre siècles occupe un haut rang et jouisse d’un grand crédit, seigneur, vous n’en êtes pas encore rendu là ; d’un autre côté, si la famille des Han est déchue, elle n’est point tombée aussi bas que celle des Yn, sous le règne de son dernier représentant. Vous devez donc absolument renoncer à une pareille résolution ! »

« Ma famille tire son origine de celle de Tchin, dans le Chen-Sy[2], qui elle-même descendait du saint empereur Chun, répliqua Youen-Chu ; d’après les lois établies par le ciel, la terre et le feu se succèdent. Or, mon nom honorifique est chemin public[3], Kong-Lou, et dans le livre intitulé Tsan, on lit : « La famille des Han transmettra le trône à la route élevée. J’ai entre mes mains le sceau héréditaire des Empereurs, et si je ne me déclare pas souverain de la Chine, je m’oppose aux

  1. Allusion à la chute du dernier des Yn (1137 avant J.-C.), qui fut vaincu par Wou-Wang, fondateur de la dynastie des Tchéou, et fils de Wen-Wang. L’aïeul de ce dernier est proprement l’esprit des céréales ; la fable le représente comme ayant appris l’agriculture aux Chinois.
  2. Le Chen-Sy a été le berceau du peuple et des premières dynasties de la Chine.
  3. Voir vol. Ier, note de la page 246. Chin-Nong qui régnait par le feu, céda le trône à Houang-Ty qui régna par la terre, selon le Chou-King. De là, cette allusion aux éléments qui se succèdent. Lou, caractère qui entre dans la composition du mot Kong-Lou, signifie terre battue par le pied des passants ; Tsan veut dire preuves, témoignages. Nous ne cherchons point ici à éclaircir ces données fabuleuses, mais seulement à expliquer les mots assez obscurs de notre texte.