Page:Theodore Pavie - Histoire des trois royaumes vol 2, Duprat, 1851.djvu/58

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êtes, vous vous déclarez Empereur, vous vous révoltez contre le légitime souverain, et cela avec le sceau de jade que je vous ai laissé en gage ! Allez, vous n’êtes que des bandits sans foi… Je veux augmenter mes armées pour aller châtier vos crimes, et je consentirais à prêter du secours à des rebelles ! » Là-dessus pour expliquer son refus, il écrivit à Youen-Chu la lettre suivante[1].

« J’ai appris ceci : Dans le ciel, il y a l’esprit d’une planète chargé de tenir le compte de nos fautes[2] ; les anciens et saints Empereurs avaient placé à la porte de leur palais, un tambour sur lequel on frappait pour demander justice[3] ; ce qui facilitait le châtiment des crimes, et rendait plus promptes les accusations à porter contre les délinquants. Et pourquoi en était-il ainsi ? Parce que, en toute chose, s’il y a un côté visible, apparent, il y en a un aussi qui échappe au regard[4]. L’hiver dernier, quand le bruit circula, à votre instigation, que vous alliez monter sur un trône, chacun s’émut et douta ; puis en vous voyant préparer tous les insignes du pouvoir souverain, chacun fut forcé de croire à la vérité de cette nouvelle.

» Maintenant voici ce que je vois : passant des paroles à l’exécution, et fidèle à ce plan que vous poursuiviez déjà, vous avez fixé le mois, le jour où vous vouliez le réaliser. Quant à moi au contraire, j’en ai été affligé, je croyais encore que

  1. Cette lettre, écrite en style ancien, fort difficile et peu intéressante en elle-même, est traduite pour le lecteur consciencieux, qui s’étonnerait de voir supprimer un de ces morceaux auxquels les Chinois attachent un grand prix. Elle ne se trouve pas dans la petite édition in-18.
  2. Croyance propre aux Tao-Ssé ; voir le livre des Récompenses et des Peines, traduit en français par M. Stanislas Julien.
  3. Voir le Ssé-Chou, édition impériale, K. Ier ; le vol. Ier de l’Histoire générale de la Chine, et les planches de l’ouvrage de M. Pauthier, sur la Chine.
  4. Le texte chinois dit : « En toute chose, s’il y a ce qui est long, certes aussi il y a ce qui est court. » Nous avons traduit littéralement l’interprétation tartare, dans ce passage comme dans beaucoup d’autres ; ce qui nous a obligé à paraphraser un peu des pensées exprimées en style concis et à peine intelligible.