Page:Theodore Pavie - Histoire des trois royaumes vol 2, Duprat, 1851.djvu/60

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rebelles. Hors de là, il n’y a aucun succès à espérer ; celui qui ne pense qu’à s’agrandir par la rébellion, celui-là ne trouvera rien dans tout l’Empire qui justifie ses espérances. — Premier point.

» Autrefois, quand Tching-Tang renversa l’Empereur Kié, il était autorisé par les crimes nombreux de ce dernier prince de la famille des Hia ; quand Wou-Wang attaqua le dernier prince de la dynastie des Yn[1], Chéou-Sin, il alléguait les fautes graves commises par les Empereurs de cette race. Malgré leur haute vertu et leurs grands talents, ces deux chefs de dynasties n’auraient point régné dans leur siècle, s’ils n’avaient rencontré l’heure marquée par le destin, et s’ils s’étaient soulevés sans raison légitime. Or, notre jeune prince n’a point péché à la face de l’Empire ; seulement, comme il compte encore peu d’années, il est dominé par des mandarins puissants et orgueilleux. Se révolter contre lui sans qu’il ait donné de justes motifs de plainte, ce n’est point imiter Tching-Tang et Wou-Wang (dont la conduite était justifiable). — Second point.

» Si Tong-Tcho fut un brigand, s’il poussa la tyrannie jusqu’à déposer son souverain, au moins n’usurpa-t-il pas le trône. L’Empire, qui connaissait ses forfaits et ses violences, a cependant fini par se mettre en garde contre lui[2], et lui vouer unanimement une haine à mort. Les troupes au dedans des passages n’étaient pas exercées à combattre ; Tong-Tcho appela les brigands plus habiles dans le métier des armes qui vivaient sur les frontières, et il put se soutenir quelque temps encore. Aujourd’hui, tous les hommes de toutes les provinces ont appris à se battre, et la guerre est pour eux un jeu. Entre les mains de nos ennemis, la victoire est un instrument de désordre ; entre les nôtres, elle amène l’ordre ; ils sont des rebelles et nous sommes des sujets soumis. A la vue des tristes

  1. Allusion à la chute des deux dynasties Hia et Yn ; voir l’Histoire générale de la Chine.
  2. Littéralement : retroussa sa manche d’un sentiment unanime.