Page:Theuriet – Frida.djvu/66

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— Il faudrait lui donner un lit chez nous… On voulait le faire coucher dans la chambre de la mère Chiffaudel, ça ne lui allait guère…

— Je comprends, interrompit la liseuse avec un sourire, et alors toi, Frida, tu lui as offert l’hospitalité chez nous ?

— Oui, grand-tante Gertrude.

Les deux tantes se remirent à converser entre elles dans cette langue rauque qui ressemblait à un grimoire, et que je sus plus tard être de l’allemand. Puis elles donnèrent des ordres à la servante, qui alluma un bougeoir et disparut.

Ce dialecte sauvage, la singulière tournure des deux maîtresses du château, l’aspect même de cette grande salle mal éclairée où les portraits avaient l’air de me regarder de travers et où le perroquet, tout à fait réveillé, se dandinait sur ses pattes, en criant lugubrement dans le même patois : « guten Abend ! (Bonsoir), » tout cela me semblait tenir du sortilège. Je comprenais maintenant que Frida, vivant dans l’entourage de ces