Page:Theuriet - Bigarreau, 1886.djvu/179

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que sa tête s’appuyait câlinement sur mon épaule.

— Pauvre santito ! reprenait-elle, tu as passé très tristement ton temps à Grenade ; mais, va, je t’en dédommagerai, et nous aurons encore de bons moments… D’abord l’empresa ne restera pas toujours ici ; dans un mois, nous irons à Murcie, et nous y serons libres comme l’air.

Elle s’interrompait pour me donner des baisers et s’étonnait de me voir répondre à ses caresses avec plus de tiédeur que de coutume. Bien que je fusse heureux de la retrouver, je me sentais nerveux et une vague inquiétude me paralysait. Malgré moi, je pensais à son mari, le mayoral, et cette désagréable image se dressait à chaque instant devant mes yeux.

— Allons ! déride-toi, continuait-elle, oublions les heures tristes, profitons de cette nuit qui nous appartient, et vive l’amour !

Elle me serrait plus étroitement dans ses bras, la chaleur de son corps me pénétrait, l’odeur de géranium qui l’imprégnait commençait à me monter à la tête et je fermais doucement les yeux.

— Aime-moi bien, soupirait-elle, et ne te tracasse pas l’esprit !… Ici, nous ne serons pas dérangés par cette brute de Paco…