Page:Theuriet - Bigarreau, 1886.djvu/62

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gnait de la même éblouissante rougeur. Au zénith, le ciel, très pur, prenait des tons de turquoise. Sous la feuillée, des oiseaux se remisaient avec de faibles gazouillements, tandis que les geais se chamaillaient encore bruyamment dans le fourré. Peu à peu, le crépuscule arriva ; le soleil avait complètement disparu ; les hautes campanules fleuries n’avaient déjà plus qu’une faible teinte lilas, et une buée blanche, dans les fonds, suivait en rampant le cours capricieux de la Fontenelle, dont la voix montait plus distincte à travers la forêt silencieuse.

La marmite bouillait doucement sur le brasier. Bigarreau quitta son billot et vint s’étendre dans l’herbe sèche, aux pieds de Narine, à côté du feu, qui bleuissait sous les cendres. Ils ne parlaient plus ni l’un ni l’autre ; la tête renversée, les yeux au ciel, ils regardaient les étoiles poindre dans l’azur plus sombre.

— Pourquoi, s’écria brusquement Bigarreau, pourquoi ne sommes-nous pas tous deux seuls dans le chantier ?… Ce serait si bon de travailler ensemble, Norine !… de préparer à nous deux notre souper et d’attendre la nuit comme cela, l’un près de l’autre !