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LE SECRET DE GERTRUDE




I


La journée tirait à sa fin — une pluvieuse journée de février — et bien que le ciel se fût éclairci, la lumière pénétrait déjà avec peine à travers les carreaux verdâtres de la pièce où se réunissait chaque soir la famille de Mauprié. Les fenêtres donnaient sur l’unique rue du village ; en soulevant le rideau, on pouvait apercevoir la route détrempée par la pluie, la rue tournante, les maisons basses aux toits moussus, l’abside de la vieille église de Lachalade, et dans le fond, la forêt d’Argonne voilée d’une brume violette. Près de l’une des croisées, la veuve de David de Mauprié se tenait droite dans son fauteuil et raidedans ses vêtements noirs ; sa figure affilée et pointue se profilait sur la mousseline du rideau, et l’on voyait ses mains sèches agiter