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Page:Theuriet - Gertrude et Véronique, 1888, 4e mille.djvu/149

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L’entretien fut interrompu par l’entrée de madame de Mauprié suivie de Gaspard en grand deuil. Pour la première fois, depuis longtemps, le farouche chasseur avait endossé une redingote noire ; aussi paraissait-il fort mal à son aise dans ce vêtement qui gênait ses mouvements brusques. Cette gêne donnait seule à sa figure une expression un peu attristée, car, bien qu’il fît des efforts pour prendre un air grave et recueilli, on devinait au fond de lui une joie qui ne demandait qu’à déborder. L’hypocrisie n’était pas son défaut, et il avait grand’peine à ne pas siffler son air favori, tandis que Phanor tournait autour de lui et semblait déconcerté à la vue de son maître ainsi accoutré. Bientôt Reine et Honorine firent leur apparition dans un nuage de crêpe noir, et après un rapide déjeuner, toute la famille prit silencieusement le chemin de la maison mortuaire.

L’Abbatiale avait ce jour-là l’air plus désolé que d’ordinaire. Le brouillard de décembre l’enveloppait, et, à travers la brume, les voix traînantes et plaintives des cloches ajoutaient encore à la tristesse de son aspect. Dans une chambre du rez-de-chaussée le cercueil d’Eustache Renaudin, sous un poêle de deuil, entre quatre cierges mélancoliques, attendait les porteurs.