Mais tout se passe comme si le dilemme avait été tourné : la courte vie d’un demi-siècle fut celle de Balzac, la vie d’un siècle, les trésors de l’antiquaire, l’héritage de la Tontine, appartinrent à la Comédie Humaine.
La Comédie Humaine est le témoignage et le musée vivant d’un siècle français. Et à vrai dire elle contient plus que ce siècle : elle a ses racines dans la génération de 1789, dans la Révolution française, et particulièrement dans la révolution économique, dans le transfert des propriétés. Elle raconte particulièrement l’histoire de la génération de Balzac, de celle qui, née avec le millésime du siècle, a vingt ans en 1820, et rencontre sa grande coupure en 1850, l’année où meurt Balzac. Mais coupure pour les hommes, non pour les choses, pour Balzac et non pour l’histoire ou la comédie de son siècle. On a remarqué plusieurs fois que la Comédie Humaine prévoit et préforme la société du Second Empire. La génération de 1850 est une génération balzacienne. Et Balzac continue à faire comprendre, à pénétrer, à aimanter la France de la génération de 1885. Le monde balzacien et le XIXe siècle, qui ont commencé en 1789, finissent en 1914. Avec la génération de 1914, la Comédie Humaine prend figure de roman ou de cycle historique.
Pas plus que Rembrandt, Balzac ne prend le saillant ou le typique tout faits, tels qu’ils sont exposés à la lumière. Pour Saint-Simon (le plus balzacien des écrivains français avant Balzac, comme Proust sera le plus balzacien après Balzac) les personnages saillants de sa Comédie de Versailles sont