qui veulent sacrifier la jeunesse de Sainte-Beuve à la maturité du lundiste. Sainte-Beuve l’eût approuvé. Il se résigna mal à la vocation et à la gloire solide dans lesquelles il fut précipité par une fortune qui ne l’avait pas consulté. Il souffrit de n’être que le délégué du public auprès des maîtres, de ne pas se sentir maître et créateur. Il éprouva assez peu par le dedans la portée et la force de sa critique créatrice. Il connut plutôt cette faculté critique à l’état de refoulements : refoulements d’un poète, d’un romancier, d’un moraliste.
D’un romancier. Volupté est le roman d’un Obermann cultivé et parisien, et surtout d’un critique, d’un témoin, d’un frôleur, d’un voluptueux d’épiderme, qui rôde indéfiniment autour des demeures, des amours, des énergies, de l’action et de la vie où il n’entrera pas. Son poids de vie intérieure vaudra toujours à ce livre, dans chaque génération, quelques douzaines de fervents (le côté d’Amiel). Le style est d’une harmonie composite et travaillée, de même que celui des vers de Sainte-Beuve, mais en prose il trouve la voie libre, et neuve. Nous ne nous étonnons pas qu’Amaury se fasse prêtre en 1830, comme il serait entré à Port-Royal en 1650. Sainte-Beuve serait le plus « clérical » des grands écrivains du XIXe siècle, si Renan n’existait pas. Il entre chez les auteurs comme il a pu