Il ne s’agit plus ici d’André Gide, qui n’a représenté avant la guerre qu’une critique de goût et de nourriture solitaires : d’où peut-être jusqu’en 1914, sa situation mineure, en marge, son public et son influence limités. Le premier plan non dans la critique purement littéraire, mais dans cette critique générale par laquelle le détail de la critique littéraire est renouvelé et commandé, appartient d’un côté à Barrès, à Maurras, d’un autre côté à Péguy, et à leurs groupes.
Barrès tient ici une place de grand chef, distant, à la manière de Chateaubriand. Comme il n’a guère apporté à la critique littéraire que quelques intuitions, il n’y a pas lieu d’en tenir grand compte. Tout autre fut le rôle de Maurras. Il fut pendant dix ans critique littéraire de métier, recenseur de livres et d’idées. L’affaire Dreyfus le tourna de plus en plus du côté de la politique, le mouvement nationaliste de 1900 à 1908 lui donna une influence, une école, et la fondation de l’Action Française, quotidienne en 1908, une tribune. Le mouvement d’Action Française eut pour chefs des littérateurs ; Maurras, Daudet, Bainville. Dans l’ordre du temps, il est commandé (et recommandé à l’attention des lettres) par une Littérature d’abord ! Maurras a même été, en matière de critique littéraire, le seul écrivain de son temps qui ait vraiment fonctionné comme chef d’école ; la thèse de Pierre Lasserre en Sorbonne sur le Romantisme français, la