Aller au contenu

Page:Thibaudet - La Campagne avec Thucydide, 1922.djvu/235

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

guerres médiques et la guerre du Péloponèse, la ligue athénienne et la ligue péloponésienne s’étaient répandues en guerres incessantes, coupées de trêves, le reste des Grecs se rangeant plus ou moins d’un côté ou de l’autre, « continuelle alternative de trêves et de combats soit entre eux soit contre les alliés qui les abandonnaient ». Tout indiquait que les problèmes pendants ne pouvaient être résolus que par la guerre. De même, avant la grande guerre européenne, les problèmes locaux ne demandaient qu’à prendre figure de problèmes généraux, suscitaient les guerres locales de Mandchourie et des Balkans, qui dessinaient une guerre générale, se tendaient vers elle comme vers leur accomplissement et leur forme.

Les deux guerres sont amenées par le moyen même qu’on avait cru expédient pour éviter la guerre : les alliances. Elles se produisent automatiquement au moment où toutes les grandes puissances ici de la Grèce et là de l’Europe sont partagées en deux alliances rivales. Dans les deux cas, chacune de ces alliances s’est formée expressément et sincèrement avec le dessein de maintenir la paix, de garantir aux participants une chance supplémentaire de paix. Et inévitablement, par l’effet d’une claire logique, ces alliances ont tourné en un engrenage de guerre, ont multiplié les chances de guerre. L’alliance de Lacédémone avec la grande puissance maritime du Péloponèse entraîne, dès que Corinthe entre en conflit avec Athènes, Lacédémone dans une guerre maritime. L’entrée des Corcyréens dans l’alliance d’Athènes amène Athènes à une guerre contre Corinthe. Du jour où la plus grande partie de la Grèce est inscrite soit dans l’alliance péloponésienne soit dans l’alliance athénienne, aucune guerre ne peut demeurer localisée.