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Page:Thibaudet - La Campagne avec Thucydide, 1922.djvu/95

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des marines grecques. C’est bien l’expansion de cette marine qui, amenant un conflit nécessaire avec celle d’Athènes, engendre le premier prétexte de la guerre. La rivalité d’Athènes et de Corinthe au sujet des bouches de l’Adriatique domine toute la première phase de la guerre du Péloponèse. (Ainsi, de 1840 à 1914, toutes les guerres et les menaces de guerres générales, dans une Europe intéressée tout entière à la mer, naissent originellement de la triple question des trois bouches de la Méditerranée : Constantinople, Suez et le Maroc.) Tout vient ici de la grande expédition entreprise par Corinthe et ses alliés pour fonder une colonie à Épidaure, le futur Dyrrachium, tête de pont des communications entre les terres grecques et les terres italiennes. Ils se trouvent en lutte avec Corcyre, ancienne colonie corinthienne qui a la troisième marine de la Grèce, entend ne pas être absorbée par sa métropole et recherche contre elle l’alliance d’Athènes. La guerre qui embrase le monde entier naît d’une question de bouche maritime. Mais on peut fort bien admettre que cette cause seconde demeure prise dans le grand procès général de la rivalité entre Athènes et Lacédémone, ne pas trop déranger les perspectives d’ensemble de l’étiologie fixée par Thucydide.

Athènes se convertissant entière à une politique maritime, il était naturel et nécessaire que cette politique maritime, comme celle de l’Angleterre, se gouvernât selon quelques rythmes simples. C’est ainsi que, dès le principe, l’Athènes de la guerre du Péloponèse suit les mêmes directions de géographie et d’histoire, de politique et de volonté que l’Athènes des guerres médiques. La conduite que préconise Périclès au début de la guerre est celle que Thémistocle a fait adopter, pour le salut de la Grèce, au moment de l’invasion de Xerxès :