Page:Thiers Adolphe - Histoire de la Révolution française t1 (1839).pdf/134

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trats. Faisant néanmoins abnégation de lui-même, il allait se livrer au soin si difficile des subsistances, et nourrir un peuple qui devait l'en payer par tant d'ingratitude. Il restait à nommer un commandant de la milice. Il y avait dans la salle un buste envoyé par l'Amérique affranchie à la ville de Paris. Moreau de Saint-Méry le montra de la main, tous les yeux s'y portèrent, c'était celui du marquis de Lafayette. Un cri général le proclama commandant. On vota aussitôt un Te Deum, et on se transporta en foule à Notre-Dame. Les nouveaux magistrats, l'archevêque de Paris, les électeurs, mêlés à des gardes-françaises, à des soldats de la milice, marchant sous le bras des uns et des autres, se rendirent à l'antique cathédrale, dans une espèce d'ivresse. Sur la route, des enfans-trouvés tombèrent aux pieds de Bailly, qui avait beaucoup travaillé pour les hôpitaux ; ils l'appelèrent leur père. Bailly les serra dans ses bras, en les nommant ses enfans. On arriva à l'église, on célébra la cérémonie, et chacun se répandit ensuite dans la cité, où une joie délirante avait succédé à la terreur de la veille. Dans ce moment, le peuple venait visiter l'antre, si long-temps redouté, dont l'entrée était maintenant ouverte. On parcourait la Bastille avec une avide curiosité et une sorte de terreur. On y cherchait des instrumens de supplice, des cachots profonds. On y venait voir surtout une énorme pierre