Page:Thiers Adolphe - Histoire de la Révolution française t1 (1839).pdf/137

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placée au milieu d'une prison obscure et marécageuse, et au centre de laquelle était fixée une pesante chaîne.

La cour, aussi aveugle dans ses craintes qu'elle l'avait été dans sa confiance, redoutait si fort le peuple, qu'à chaque instant elle s'imaginait qu'une armée parisienne marchait sur Versailles. Le comte d'Artois, la famille de Polignac, si chère à la reine, quittèrent alors la France, et furent les premiers émigrés. Bailly vint rassurer le roi, et l'engagea au voyage de Paris, qui fut résolu malgré la résistance de la reine et de la cour.

Le roi se disposa à partir. Deux cents députés furent chargés de l'accompagner. La reine lui fit ses adieux avec une profonde douleur. Les gardes-du-corps l'escortèrent jusqu'à Sèvres, où ils s'arrêtèrent pour l'attendre. Bailly, à la tête de la municipalité, le reçut aux portes de Paris, et lui présenta les clés, offertes jadis à Henri IV. « Ce bon roi, lui dit Bailly, avait conquis son peuple ; c'est aujourd'hui le peuple qui a reconquis son roi. » La nation, législatrice à Versailles, était armée à Paris. Louis XVI, en entrant, se vit entouré d'une multitude silencieuse et enrégimentée. Il arriva à l'Hôtel-de-Ville[1], en passant sous une voûte d'épées croisées sur sa tête en signe d'honneur. Son discours

  1. 17 juillet.