Aller au contenu

Page:Thiers Adolphe - Histoire de la Révolution française t1 (1839).pdf/175

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

populaire, parce qu'il ne voulait pas laisser à l'aristocratie un poste d'où elle dominerait la volonté nationale. Mounier, Lally, Necker étaient presque seuls à désirer cette chambre-haute. Sieyès, par l'erreur d'un esprit absolu, ne voulait ni des deux chambres ni de la sanction royale. Il concevait la société tout unie : selon lui la masse, sans distinction de classes, devait être chargée de vouloir, et le roi, comme magistrat unique, chargé d'exécuter. Aussi était-il de bonne foi quand il disait que la monarchie ou la république étaient la même chose, puisque la différence n'était pour lui que dans le nombre des magistrats chargés de l'exécution. Le caractère d'esprit de Sieyès était l'enchaînement, c'est-à-dire la liaison rigoureuse de ses propres idées. Il s'entendait avec lui-même, mais ne s'entendait ni avec la nature des choses ni avec les esprits différens du sien. Il les subjuguait par l'empire de ses maximes absolues, mais les persuadait rarement ; aussi, ne pouvant ni morceler ses systèmes, ni les faire adopter en entier, il devait bientôt concevoir de l'humeur. Mirabeau, esprit juste, prompt, souple, n'était pas plus avancé en fait de science politique que l'assemblée elle-même ; il repoussait les deux chambres, non point par conviction, mais par la connaissance de leur impossibilité actuelle, et par haine de l'aristocratie. Il défendait la sanction par un penchant monarchique ; et il s'y