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Page:Thiers Adolphe - Histoire de la Révolution française t1 (1839).pdf/215

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dénoncer tous deux à la tribune, si le départ pour l'Angleterre avait lieu. Le duc d'Orléans fut ébranlé ; une nouvelle sommation de Lafayette le décida ; et Mirabeau, recevant à l'assemblée un billet qui lui annonçait l retraite du prince, s'écria avec dépit : Il ne mérite pas la peine qu'on se donne pour lui[1]. Ce mot et beaucoup d'autres aussi inconsidérés l'ont fait accuser souvent d'être un des agens du duc d'Orléans ; cependant il ne le fut jamais. Sa détresse, l'imprudence de ses propos, sa familiarité avec le duc d'Orléans, qui était d'ailleurs la même avec tout le monde, sa proposition pour la succession d'Espagne, enfin son opposition au départ du duc, devaient exciter les soupçons ; mais il n'en est pas moins vrai que Mirabeau était sans parti, sans même aucun autre but que de détruire l'aristocratie et le pouvoir arbitraire.

Les auteurs de ces suppositions auraient dû savoir que Mirabeau était réduit alors à emprunter les sommes les plus modiques, ce qui n'aurait pas eu lieu s'il eût été l'agent d'un prince immensément riche, et qu'on disait presque ruiné par ses partisans. Mirabeau avait déjà pressenti la dissolution prochaine de l'état. Une conversation avec un ami intime, qui dura une nuit tout entière, dans le parc de Versailles, détermina chez lui un plan

  1. Voyez la note 10 à la fin du volume.