Page:Thoinan - Les Relieurs français, 1893.djvu/30

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L’année suivante, Henri III décida qu’à l’avenir le chef-d’œuvre exigé dans toutes les corporations pour y être reçu maître ne serait plus obligatoire et qu’il suffirait pour arriver à la maîtrise d’avoir fait apprentissage pendant le temps porté par les statuts de chaque métier. Son édit à cet égard, daté du 7 mars 1583, disait :

Qu’il falloit mettre ordre aux excessives despenses que les pauvres artisans estoient contraints de faire pour obtenir le degré de maistrise estans quelquefois longtemps à faire un chef-d’œuvre tel qu’il plaît aux jurez : lequel enfin estoit par eux trouvé mauvais et rompu, s’il n’y estoit remédié par lesdits artisans avec infinis présens et banquets… Que ce chef-d’œuvre estoit une despense pour un pauvre compagnon de la ville de Paris de 60 à 200 escus… et que s’il n’avoit les moyens de faire des dons, présens et despenses, il se trouvoit tourmentez par les jurez et contraints de rechef de besongner en chambre pour les dits, bien souvent moins capables qu’eux.

Malgré cet édit et les excellentes raisons qui y étaient invoquées, il n’en est pas moins vrai que le règlement des libraires de Bordeaux, qui comprenait aussi les relieurs et qui fut décrété en 1609, portait encore que tout postulant à la maîtrise « seroit tenu de faire chef-d’œuvre[1] ». On sait, du reste, que, pour les relieurs comme pour beaucoup d’autres métiers, l’usage du chef-d’œuvre se perpétua jusqu’à la fin des maîtrises. Les règlements de 1618 et 1686 disaient que l’aspirant à la maîtrise devrait faire certifier sa capacité par deux maîtres ; mais celui de 1750 dit formellement que le compagnon « fera preuve de sa capacité par un chef-d’œuvre ».

Henri IV exempta, en 1594, les libraires, imprimeurs et relieurs du paiement des deniers pour confirmation de leurs privilèges à propos de son avènement à la couronne, et en 1595 il les déchargea aussi des subsides et impôts nouvellement établis sur les livres à l’entrée ou à la sortie de toutes les villes du royaume, en maintenant leurs anciens privilèges.

  1. Gabriel de Lurbe, Les anciens et nouveaux Statuts de la ville de Bourdeaux, in-4°, 1602, p. 97. (Communiqué par notre excellent ami M. Ollivier Beauregard.)