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qui, dans l’avenir, prendraient ses paroles dans leur sens clair et littéral. Lui qui venait sauver le monde, va-t-il laisser dans le doute ceux-là mêmes qu’il veut éclairer et racheter par sa mort ? Lui qui, à chaque fois qu’il s’est servi de paraboles ou du sens figuré, en a toujours donné l’explication ? Si ce n’est pas réellement sa chair qu’il veut donner à manger, il va certainement les avertir de ne pas commettre d’idolâtrie en adorant simplement un symbole ou une figure. Voyons, vous conviendrez avec moi que cela était son devoir ; mais continuons notre lecture, nous allons voir ce qu’il a fait.

Gustave reprend sa lecture :

Or, Jésus leur dit : En vérité, en vérité, je vous le dis, si vous ne mangez la chair du fils de l’homme et si vous ne buvez son sang, vous n’aurez point la vie en vous.

— Remarquez bien, messieurs, dit le prêtre, avec quelle solennité Jésus prononce ces paroles : En vérité, en vérité, je vous le dis, etc., pour exprimer la vérité de ce qu’il doit dire. Eh bien ! a-t-il modifié ses paroles ? Dit-il que ceux qui l’écoutaient se sont trompés dans l’interprétation ou le sens de ce qu’il vient d’affirmer ? Leur dit-il qu’en employant le mot « chair, » il n’a pas voulu parler de son corps et de son sang, mais seulement de la foi en lui ou en son incarnation ? Les prévient-il de ne pas prendre ses paroles dans leur sens littéral, car ils commettraient des actes d’idolâtrie, de superstition ou d’absurdité ? Pourquoi emploie-t-il le mot « chair » au lieu du mot « foi » ou « obéissance » ? Certes, que signifieraient ces paroles, si vous ne mangez ma chair ou ne buvez mon sang, s’il avait voulu seulement nous faire comprendre que nous lui devions la foi et l’obéissance ? Ces deux devoirs ne se mangent pas, ne se boivent pas, ils se pratiquent ; et je suis surpris que vous essayiez de détourner le sens de paroles aussi nettes et aussi précises. Non, Jésus-Christ, loin de modifier ses paroles,