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M. Johnson n’était guère plus à son aise ; après avoir essayé longtemps de tourner cette expression, « c’est ma chair, » pour lui donner cette signification, « le pain que je donnerai, c’est le symbole de ma chair, » ce dernier crut devoir répondre :

— Jésus-Christ, dit-il, a, depuis le commencement de ce chapitre, parlé dans un sens figuré ; il parle encore dans le même sens en employant le mot « chair, » et en désignant la foi par le mot « pain. » Il a voulu dire : « Le pain que je donnerai est la foi en ma chair, c’est-à-dire en mon incarnation. »

— Ainsi, dit le prêtre, c’est la foi en son incarnation que Jésus-Christ à donnée sur la croix pour sauver le monde, et non sa chair, et, d’après ce que vous dites, c’est cette foi que nous devons manger avec nos bouches, comme les Israélites ont mangé la manne. Mais continuez la lecture, nous allons voir comment les Juifs ont compris les paroles de Notre-Seigneur.

Gustave continua :

Les Juifs disputaient donc entre eux et disaient : Comment celui-ci peut-il nous donner sa chair à manger ?

— Ah ! combien de fois ai-je entendu faire la même question, dit madame Dumont, qui prêtait la plus grande attention à cette discussion.

— Oui, ma mère, dit Gustave, vous voyez qu’il y avait de bons protestants parmi les Juifs.

M. Johnson, piqué au vif, s’écria :

— Nous savons que les Juifs comprirent les paroles de Jésus-Christ dans leur sens littéral ; certes, nous n’avons pas besoin d’imiter une nation aussi sensuelle que sotte et ignorante.

— Admettons, dit le prêtre, que ceux à qui Jésus-Christ s’adressait étaient des ignorants ; mais ce bon Sauveur va corriger leur erreur et les avertir qu’ils ont mal compris, sinon par amour pour eux, au moins par amour pour les millions de croyants