Page:Thomas Felix - La philosophie de Gassendi, 1889.djvu/24

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avec exactitude quelle est la part d’Aristote dans les écrits qu’on lui attribue. Nous savons, en effet, que ses interprètes les mieux informés, Simplicius et Themistius se posaient déjà le problème de leur authenticité et que la liste des ouvrages d’Aristote dressée par D. Laerce n’est point conforme à celle des péripatéticiens modernes : il en est probablement de ces travaux comme des travaux d’Hercule ; plusieurs les ont accomplis, un seul en a. la gloire. Il y a plus : admettons que tous ces ouvrages soient authentiques ; comme certainement ils ont été altérés et remaniés par des disciples plus ou moins autorisés, il faudra séparer ce qui appartient au maître de ce qui lui a été prêté gratuitement ; or, quel critérium nous guidera dans cet examen critique ? Accorde-t —on que tout est de la main d’Aristote ? Il faut encore ]’interpréter ; or, étant donné son style et sa méthode d’exposition, les secours même de l’oracle ne seraient pas inutiles pour le bien comprendre. Mais écartons ces difficultés et supposons que le style d’Aristote soit toujours clnir et intelligible, deux nouvelles difficultés restent à résoudre : la première est de savoir quand il parle en son propre nom et quand il parle au nom des philosophes anciens. Comme il oublie fréquemment de nous renseigner sur ce point, grand est notre embarras. La seconde vient des formes dubitatives auxquelles il a souvent recours, ce dont ses interprètes dogmatiques semblent se soucier fort peu, bien qu’il en résulte plus d’un doute sur sa véritable pensée. Enfin, si au lieu des textes, nous consultons les commentaires qu’on en a faits, nos hésitations augmentent, car comment nous reconnaitre au milieu des contradictions qu’ils présentent ; comment surtout oser soutenir, après les avoir lus, que les ouvrages d’Aristote sont clairs, précis et contiennent l’expression dernière et parfaite de la vérité ?

Abordant alors directement l’examen de ces ouvrages, il s’applique à en faire ressortir les lacunes, les superfluités, les tautologies, les contradictions innombrables : défauts dont il serait injuste de rendre seul responsable Aristote qui, malgré tout, était un puissant génie. — Quant à la doctrine qu’ils renferment, Gassendi lui avait consacré cinq livres entiers dont le premier malheureusement fut seul publié. Ce livre contient la critique de la dialectique aristotélicienne qu’il considère, avec tous ses développements, comme stérile et fastidieuse ; les autres passaient