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climat, en été, ce fut tout d’abord presque uniquement un abri pour la nuit. Dans les gazettes indiennes un wigwam était le symbole d’une journée de marche, et une rangée de ces wigwams gravée ou peinte sur l’écorce d’un arbre signifiait que tant de fois on avait campé. L’homme n’a pas été fait si fortement charpenté ni si robuste, pour qu’il lui faille chercher à rétrécir son univers, et entourer de murs un espace à sa taille. Il fut tout d’abord nu et au grand air ; mais malgré le charme qu’il y pouvait trouver en temps calme et chaud, dans le jour, peut-être la saison pluvieuse et l’hiver, sans parler du soleil torride, eussent-ils détruit son espèce en germe s’il ne se fût hâté d’endosser le couvert d’une maison. Adam et Ève, suivant la fable, revêtirent le berceau de feuillage avant autres vêtements. Il fallut à l’homme un foyer, un lieu de chaleur, ou de bien-être, d’abord de chaleur physique, puis la chaleur des affections.

Il est possible d’imaginer un temps où, en l’enfance de la race humaine, quelque mortel entreprenant s’insinua en un trou de rocher pour abri. Tout enfant recommence le monde, jusqu’à un certain point, et se plaît à rester dehors, fût-ce dans l’humidité et le froid. Il joue à la maison tout comme au cheval, poussé en cela par un instinct. Qui ne se rappelle l’intérêt avec lequel, étant jeune, il regardait les rochers en surplomb ou les moindres abords de caverne ? C’était l’aspiration naturelle de cette part d’héritage laissée par notre plus primitif ancêtre qui survivait encore en nous. De la caverne nous sommes passés aux toits de feuilles de palmier, d’écorce et branchages, de toile tissée et tendue, d’herbe et paille, de planches et bardeaux, de pierres et tuiles. À la fin, nous ne savons plus ce que c’est que de vivre en plein air, et nos existences sont domestiques sous plus de rapports que nous ne pensons. De l’âtre au champ grande est la distance. Peut-être serait-ce un bien pour nous d’avoir à passer plus de nos jours et de nos nuits sans obstacle entre nous et les corps célestes, et que le poète parlât moins de sous un toit, ou que le saint n’y demeurât pas si longtemps. Les oiseaux ne chantent pas dans les cavernes, plus que les colombes ne cultivent leur innocence dans les colombiers.

Toutefois, se propose-t-on de bâtir une demeure, qu’il convient de montrer quelque sagacité yankee, pour ne pas, en fin de compte, se trouver à la place dans un work-house, un labyrinthe sans fil, un musée, un hospice, une prison ou quelque splendide mausolée. Réfléchissez d’abord à la légèreté que peut avoir l’abri absolument nécessaire. J’ai vu des Indiens Penobscot, en cette ville, habiter des tentes de mince cotonnade, alors que la neige était épaisse de près d’un pied autour d’eux, et je songeai qu’ils eussent été contents de la voir plus épaisse pour écarter le vent. Autrefois, lorsque la façon