Page:Thorel de Campigneulles - Cleon, rhéteur cyrénéen, 1750.djvu/135

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Déja ſon aſſiduité, ſa politeſſe, & d’adroites complaiſances ; déja l’aveu de ſon goût pour moi, le badinage auquel il ſe prêtoit, conformément à l’uſage, & mille petits ſoins flatteurs annonçoient un Proſélite, & me faiſoient eſpérer que je triompherois à la fin. J’avois à faire au plus ſubtil, au plus ferme pilier de ſa ſecte ; il me trompa.

Après m’avoir juré que le plus tendre amour étoit ſon Pilote, & que je ſerois enchantée d’être à ſon bord ; il déplia ſes voiles avec une légéreté infinie, mit ſes manœuvres en état de faire route, & commença de louvoyer à la faveur d’Eole, que peut-être je ſécondai par quelques ſoupirs. Son abordage contraire à celui de franc-étable ne m’étonna point, je le connoiſſois ; mais dans le tems que je le croyois prêt à tenir le largue, & que la Bouſſole à la main, quoiqu’il n’eut à craindre aucune déclinaiſon, je m’attendois à une abjuration ſolemnelle ; il revira ſous le vent, prit la Bouline à revers, & m’amarra ſi étroitement, que malgré les cris, les injures & les reproches de l’inſulte cruelle qu’il fai-