Page:Thorel de Campigneulles - Cleon, rhéteur cyrénéen, 1750.djvu/83

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parce que je ſens que je vous adorerai toute ma vie.

Malgré le plaiſir que me fit cet aveu, j’héſitai un moment de répondre. Je craignois de commettre ma gloire en voulant accélérer mes plaiſirs. Quelques libres que nous ſoyions de préjugés, nous devons quelquefois reſpecter ceux d’autrui ; il falloit reſiſter au moins pour l’honneur de la victoire que je lui ménageois ; je me retranchai donc à douter.

Je ne ſuis pas aſſez vaine, lui dis-je, pour me flatter d’inſpirer un ſentiment pareil ; mais je ſuis aſſez défiante pour croire qu’il pourroit être l’effet d’un caprice, d’un goût frivole, qu’un même inſtant voit naître & s’évanoüir… Votre erreur eſt cruelle, repliqua-t-il, c’eſt par l’ardeur la plus vive, & la plus conſtante que je veux la diſſiper, belle Poncetti ; permettez qu’en vous rendant tous les hommages que vous meritez, je vous oblige à penſer plus équitablement de vous & de moi ; je me flatte d’y parvenir bien-tôt, perſuadé que je ne verrai rien qui me plaiſe davantage, &