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Page:Tiercelin - Primevère, 1881.djvu/22

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PRIMEVÈRES


Primevère a treize ans. Elle est blonde. Ses yeux,
Au regard tantôt calme et tantôt soucieux,
Ressemblent aux grands lacs où le ciel se reflète,
Tantôt sombre et voilé, tantôt limpide et clair,
Et l’on y voit parfois, comme avant la tempête,
Brusque, dans leur clarté d’azur, luire un éclair.

Elle rit : tout à coup un bruit de pas l’alarme
Et son rire naissant s’éteint dans une larme !
Elle pleure : voilà qu’au milieu des buissons,
Les oiseaux ayant l’air de lui jeter des perles,
Primevère, écoutant leurs joyeuses chansons,
Gazouille au rossignol et siffle avec les merles.

Cette enfant a langui sous une main de fer.
Elle a pleuré beaucoup, ayant toujours souffert,
Sans que jamais sur elle aucun bonheur intime
Ait rayonné. Parfois, elle se plaint tout bas,
Et levant vers le ciel ses grands yeux de victime,
Elle semble appeler quelqu’un qui ne vient pas.