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LE PARNASSE BRETON CONTEMPORAIN.

SOUVENANCE

A Mademoiselle Marie M***

Je la vis une fois. — C'était... près de Paris :
Blonde, d’un blond cendré. Les yeux bleus, d’un bleu gris.
Le profil régulier des Beautés disparues...
Sa démarche superbe est rare dans les rues...
Une robe très simple : un point bleu sur du blanc.
Puis, un large chapeau d’un tour leste et galant.
Pas d’ombrelle à la main ; mais des fleurs... quelques roses.
Un rayon de soleil enrubannait ces choses.
Les grands arbres du parc, la fierté du château.
Mettaient tout autour d’Elle un décor de Watteau.
Rien de plus ravissant que cette jeune fille
Que suivait, d’un œil doux, un groupe de famille...
Je l’admirai longtemps, sans vouloir lui parler,
Comme si, vision, elle eût pu s’envoler !
Des oiseaux s’adoraient, tout là-haut, dans les branches.
Et ses yeux, grands ouverts, images de pervenches,
Suivaient pensivement les gaîtés des oiseaux...
Un étang, près de là, dormait dans ses roseaux.
Après-midi d’été.... Fleurs d’amours, fleurs de flammes,
Tout germait sous le ciel, sur terre et dans les âmes.
La Vie était conquise et le Rêve courait
Du parc à la pelouse et du lac en forêt.
Le grand livre du monde, à nature ravie,
Entr’ouvrait une page heureuse de la vie...
Quand le soleil tomba derrière les coteaux.
Laissant un éclat rouge aux vitres des châteaux,
Comme un très grand seigneur jette l'or au passage,
Ma compagne, fixant des fleurs à son corsage,