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avant l’amour

Ah ! comme je l’aimais !… Dans cette agonie de douleur à laquelle il assistait, peut-être malheureux, impuissant peut-être, rivé à des devoirs que j’ignorais, soumis à des influences étrangères, je ne trouvai pas d’autre reproche. Je courbai la tête et tout à coup, mes yeux débordant, des larmes invisibles coulèrent, sur mes joues, sur ma poitrine, sur le fer rouillé du balcon.

Il ne soupçonnait pas ces larmes. Et d’une voix plus affectueuse et plus résolue :

— Mademoiselle Marianne, quelle joie c’eût été de vivre près de vous !… Pourquoi ne suis-je qu’un pauvre musicien sans notoriété, sans fortune, condamné à l’âpre conquête du pain quotidien ?… Je ne puis pas, je ne dois pas vous faire partager mon existence aventureuse… Mais, au moins, dites-moi que vous me pardonnez…

Je voulus parler… Un sanglot me coupa la voix. Rambert tressaillit.

— Ah ! fit-il, pauvre enfant…

Et comme se parlant à lui-même :