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Page:Tinayre - L Oiseau d orage.djvu/171

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le souci d’être correct, l’effort de paraître affectueux. Les rôles étaient changés ; Marthe, à son tour, quêtait les témoignages de tendresse dont Jean se montrait parcimonieux. Elle cherchait un refuge près de celui qui, seul au monde, connaissait son secret, et pouvait lui procurer le soulagement relatif des confidences. Mais Jean se dérobait toujours. Ses visites s’espaçaient. Quand il se trouvait seul avec la jeune femme, il l’écoutait d’un air d’ennui, comme s’il subissait une corvée. Et Marthe voyait, avec épouvante, qu’il ne l’aimait plus, qu’il ne l’avait jamais aimée, qu’elle avait été pour lui le jouet d’un jour. Ne lui avait-il pas déclaré, dans un moment d’impatience, qu’il espérait bien n’être pas le père de l’enfant qu’elle portait ?

Dans cette situation affreuse, au lieu de se répandre en larmes et en reproches, elle s’était roidie et durcie en une âpre résignation. Silencieuse mais sagace, elle percevait les pensées de Demarcys, et lui rendait en mépris son indifférence. L’expérience que peut donner une longue vie, Marthe l’avait reçue en quelques