Aller au contenu

Page:Tinayre - La Douceur de vivre.djvu/151

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

jardin, d’un décimètre carré, taillé dans du liège et peint en couleur de verdure et de rocaille. L’excellent Gramegna était comme l’excellent Spaniello, un maniaque, doucement envoûté par Pompéi. Ses ambitions, ses amours, toute son existence d’homme jeune, tenaient dans l’enceinte ruinée, entre la porte du Vésuve et la porte de Stabies, entre la porte d’Herculanum et la porte de Nola.

Angelo lui demanda un jour s’il était amoureux…

— J’ai une maîtresse, répondit Gramegna effrontément.

Et il ajouta, avec un bon rire :

— Tu la connais. Elle loge dans le petit musée, près de la porte Marine… On peut l’y voir, toute nue, comme Vénus. Et pas une Napolitaine n’a des reins plus élégants et des jambes plus fines.

Il parlait du célèbre moulage qui reproduit la forme d’un jeune corps féminin dissous dans la cendre durcie.

Angelo ricanait :

— Si ça te suffit !

Et il insinuait que Pompéi « manquait de femmes ».

— Allons donc ! À l’auberge de la Lune…

— Des Walkyries, énormes et blanches, de véritables icebergs… Elles me glacent le sang