Page:Tinayre - La Douceur de vivre.djvu/182

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çaises ». L’écriture était ornée, le style galant, le sens très mystérieux. Angelo pensait que la « gentille et belle dame » serait heureuse d’avoir quelques nouvelles de son père bien-aimé, lequel était toujours mélancolique. Certes, Angelo faisait plus que l’impossible pour le consoler, et pourtant lui-même, infortuné, avait bien besoin de consolations…

Marie montra cette lettre à Salvatore.

— Moi aussi, dit le sculpteur, j’ai reçu une lettre d’Angelo. Il me prie d’aller voir aujourd’hui un de mes modèles, un certain Ciccio, bonne gouape de camorriste, qui loge chez sa mère, une honnête femme, très pauvre, quand il n’est pas en prison, et je dois, ce soir même, avertir Angelo si j’ai trouvé l’oiseau dans le nid… Mon frère a donc besoin d’un modèle, et de ce modèle ?

— Probablement… Voulez-vous m’emmener chez la mère de Ciccio ?

— Vous, madame Marie ?… C’est impossible.

— Il y a un danger ?

— Non, mais les vieilles rues de la vieille Naples !… Enfin, si vous le désirez, je veux bien vous conduire dans cette Naples qui est mienne, que je connais, pierre par pierre, et presque homme par homme… Prenez une robe courte et