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Page:Tinayre - La Douceur de vivre.djvu/28

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le beffroi dont la tour carrée, large de base, fortement enracinée au sol, monte d’un jet puissant, se complique, s’affine et s’achève en plein ciel par un campanile bulbeux, miracle de fantaisie et de hardiesse.

Le cher asile de Marie reflète son âme : ordre, pureté, clarté, — point de joie… Point de tristesse pourtant. Après avoir beaucoup pleuré, Marie est devenue calme, puis sereine ; et, maintenant, elle ne semble pas malheureuse de n’avoir pas de bonheur. Est-ce l’amour ravivé de Dieu, est-ce l’amour nouveau de l’art qui l’a tirée de sa passivité mélancolique ? Claude Delannoy, à qui rien n’échappe de ce qui intéresse Marie, dit parfois que l’on peut tout espérer d’une femme qui vit à la hauteur des oiseaux et des cloches. Les inguérissables, les découragés, craindraient cette solitude baignée de lumière. Le jour les blesse, comme la vérité. Ils veulent les demi-teintes, le clair-obscur, les contours indécis… Marie Laubespin aime à voir clair en elle et autour d’elle.

Cette renaissance de son énergie s’est manifestée surtout depuis deux ans, depuis qu’elle a entrepris, à l’instigation de son ami Claude, une série de miniatures, d’après les maîtres italiens et flamands. Ces miniatures — variations admirables sur un thème unique — doivent former le Livre des Annonciations, dont Guillaume Wal-