Page:Tinayre - La Douceur de vivre.djvu/332

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Je l’ai vue briller dans la nuit, cette porte ! et je n’ai pas deviné que tu allais vers elle, sournoisement, comme une voleuse.

— Notre petite chambre !… la fenêtre et le figuier !… le verre où nous buvions !… la lampe qui se pâmait avec nous… J’ai tout ça dans ma mémoire ; j’emporte ce trésor ; je le contemplerai tous les soirs de ma vie, et je ne pleurerai plus d’être née…

— Tu as perdu toute pudeur… Tu es digne de ton amant !

— Envie-moi, Marie ! Sois jalouse !

— À qui t’es-tu donnée !…

— Tu ne le connais pas…

— Ensemble, nous avons ri de lui… de son langage, de ses façons…

Les yeux d’Isabelle détestaient Marie.

— Je ne le connaissais pas…

— Tu l’aimes parce qu’il est beau, parce qu’il est flatteur et cynique, parce qu’il t’a dépravée.

— Non, tu ne sais pas pourquoi je l’aime.

— Il te perdra tout à fait ! Il ruinera ta vie ! Je veux te sauver, malgré toi… Tu te trompes, Belle ! tu n’aimes pas cet homme d’un amour profond ! Tu es dupe de ton imagination et de tes sens… L’Italie t’a ensorcelée… C’est l’Italie que tu aimes dans la personne de ce bellâtre… Si tu